Diaire sur sol

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mercredi 13 septembre 2023

Un opéra naturaliste inédit de Ravel ?

Connaissiez-vous l'opéra naturaliste de Ravel autour de l'amour impossible entre une fille de riches vignerons et un pauvre saisonnier vendangeur ?

Ce moment vous est offert par France Culture.

Playlist 'Offertoires de Requiem'

Nouvelle playlist, consacrée aux Offertoires de Requiem.

(Mes chouchous sont bien sûr Gilles, Campra, Verdi, Dvořák et Britten, mais on y rencontrera aussi Morales, Gossec, Cherubini, Desenclos, et quelques autres qui méritent le détour !)

Il existe déjà une notule autour des plus beaux Requiem.

Improvisation et formules

Côté improvisation, du nouveau. Je m’aperçois – car je suis un garçon profond – que la pratique de l’écoute et du déchiffrage nourrit énormément : je me retrouve avec tout un répertoire de formules que je peux emprunter et combiner… C’est ainsi que je me suis amusé, après avoir déchiffré trois différents medleys de Star Wars (un officiel, deux officieux), à redéployer certains motifs (la Force, Leia…) en les superposant avec ceux de la Femme sans ombre (chasse, biche, pierre, Impératrice…) et quelques moments du Vampyr de Marschner. J’ai ainsi combiné la Force avec la Chasse, Leia avec « Er wird zu STEIN », etc. C’est assez facile de réutiliser, d’une part, et d’autre part j’essaie de réemployer des astuces pour renouveler le discours – modulations de relance le temps de trouver d’autres idées, fusées façon Arabella pour déguiser les chromatismes, ajout de neuvièmes-onzièmes-treizièmes un peu partout, nouvelles mélodies inventées à partir de mouvements mélodiques et rythmiques déjà lus…

En réalité, sauf à avoir déjà soi-même un style de compositeur, il n’est pas si difficile de réemployer des formules qu’on a déjà croisées, de les déformer, de les combiner pour créer quelque chose de neuf. C’est infiniment plus accessible que je ne l’aurais pensé, surtout en fin de séance lorsqu’on a baigné dans le langage de tel compositeur. (Évidemment, plus le langage est tardif et dissonant, moins on sent les errances et limites culturelles et/ou techniques de l’improvisateur.) De surcroît, j’ai l’impression d’avoir davantage appris de la mécanique interne de la musique en deux semaines de pratique désordonnée de l’improvisation sur un style donné qu’en un semestre d’étude méthodique ponctuelle de l’harmonie (nécessaire tout de même pour comprendre ensuite ce qu’on fait).

Attention, bien sûr, ce n’est pas du tout que j’improvise bien, très loin de là, il y a des fausses routes, des platitudes, des erreurs, et je ne fais finalement que piller mentalement des choses lues pour les enchaîner en les déformant volontairement (ou pas, ma mémoire me trahit quelquefois). Cependant je reste impressionné par le caractère très accessible de l’approche, je pensais qu’il me faudrait des semaines ou des mois avant que de pouvoir m’amuser un peu. Je ne sais pas si c’est généralisable pour les pianistes qui lisent peu de musique – le risque est alors d’être bloqué dans la petite zone de confort des quelques enchaînements qu’on connaît, comme je l’avais vécu dans mes précédentes tentatives où j’avais voulu improviser dans « mon style » et en ne faisant pas de « fautes », ce qui avait conduit à l’enfermement dans les plus conventionnels des schémas, et l’impossibilité de faire évoluer le discours ou de produire quoi que ce soit de stimulant.

Mais en acceptant le jeu du pastiche et la possibilité de l’erreur, en se concentrant moins sur l’intérêt de ce qu’on produit que sur les processus (et en lâchant prise aussi, je retrouve les impressions « d’écriture automatique » que j’ai parfois en jouant des partitions difficiles, où au bout d’un certain temps mes doigts inventent des morceaux du spectre sonore en restant dans le style, sans que ma tête commande grand’chose…), on peut accéder à une compréhension assez passionnante et plus intime du processus de composition. (Du moins, d’un fragment de celui-ci.) Incroyable aventure que je recommande – de surcroît on tend à improviser à son propre niveau technique, ce qui veut dire qu’on rencontre moins la barrière de la difficulté pratique.

Fin de Gutenberg / improvisation

Le déchiffrage quotidien au piano se poursuit, adjoint de relectures et d’improvisation. Je n’ai pas le temps de le commenter tous les jours. Aujourd’hui, c’était le déchiffrage de l'acte III de Gutenberg de Loewe, vraiment une œuvre insolite et considérable qu’il me faudra trouver un moyen de partager et de commenter. (Pour une œuvre de 1837, la filiation mozartienne est vraiment étonnante, avec par endroit des sorties de route qui paraissent au contraire excéder Schumann !)

Un peu de travail sur 1812 de Tchaïkovski, relecture du prélude sur la Moskova de Mouss' et de sa Grande Porte de Kyiv. Pour finir, improvisation sur des cantiques orthodoxes (en ajoutant de plus en plus de notes étrangères, avec effets de cloche et d'agrégats).

Un Mont Rushmore à la française…

J'ai vu passer une question sur les réseaux qui m'en pose beaucoup d'autres.

« Si on concevait un mont Rushmore à la française sur le mont Peney, et qu'il fallait choisir 4 personnalités historiques à sculpter, qui choisiriez-vous et pourquoi ? »

Ma proposition :

¶ Charles-Michel de L'Épée
¶ Pierre-Michel Moisson-Desroches
¶ Marcel Deprez
¶ Antoine-Joseph Jobert de Lamballe

Pierre Michel Moisson-Desroches : c'est l'auteur du fameux rapport de 1817 suggérant le raccourcissement des distances grâce à un réseau ferré en étoile depuis Paris (directions : Bordeaux, Nantes, Le Havre, Calais, Lille, Mayence, Gênes). Il est aussi un conseiller important lors du déploiement du chemin de fer sous la Restauration. Donc réellement quelqu'un qui a eu un impact sur nos vies, plus durablement (et plus positivement…) que Napoléon – et je ne crois pas qu'il existe aucune trace de sa bouille.

[En réalité, Napoléon a peut-être vraiment eu une influence durable sur nos vies, puisqu'il existe une hypothèse, lue en plusieurs endroits, sur la propension aux varices dans la population française. #MerciNapo ]

Marcel Deprez. L'ingénieur à l'origine des premiers transports d'électricité sur des distances significatives, en Allemagne et en France, au début des années 1880. Tout commence – comme une belle rando – par un Paris-Creil. Il a clairement davantage influencé nos vies que n'importe quel maréchal d'Empire…
(sauf pour les varices, si vous avez bien suivi)
Je me demande s'il y a beaucoup de rues à son nom.
(probablement pas)

Antoine-Joseph Jobert de Lamballe : travaux (et pratique) importants dans l'autoplastie (réparation de tissus par les tissus sains proches), l'élitroplastie, l'anesthésie générale. Si l'on souffre moins, c'est grâce à lui (et pas à Jibé Kléber ou Paul Doumer).

Pour finir, l'abbé de L'Épée que tout le monde connaît ; à la fois la charité et la pédagogie, quelqu'un qui non seulement a tâché de soulager les souffrances de ses contemporains, mais a de surcroît bâti à cet effet un système de pensée pérenne.

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Et si l'on fait plutôt le choix de mettre des artistes :

→ Marc-Antoine Girard de Saint-Amant
→ Jean-Jacques Lequeu
→ Jean Cras
→ Patrick Edlinger

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Tout ce petit monde donne une idée, je crois, de la représentation tout à fait fantaisiste que nous nous faisons des grands hommes. Et de notre piètre perception de ce qui est réellement important. Bouvines et Austerlitz, c'est bien gentil, mais qu'est-ce que ça a changé dans nos vies par rapport à l'électricité, au train, à l'anesthésie générale ?

… Je propose donc de remplacer toutes les rue Hoche par des rue de l'élitroplastie.

Plagier avec discernement

Les histoires de plagiat me fascinent par bien des points.

Et notamment par la mansuétude avec laquelle elles sont accueillies. Dans cet entretien, le directeur du comité d'éthique de Polytechnique explique que si le faussaire avait répondu poliment, ça passait.

nous pensions possible qu’il reconnaisse ses erreurs et se confonde en excuses, comme tout étudiant de bonne foi l’aurait fait, et nous nous préparions à trouver une solution à l’amiable.

(Bonne foi, quand on fait un plagiat ? Une fois qu'on est pris bien sûr.)

Le reste des membres se penchent sur la thèse et constatent le plagiat intégral du chapitre XIII, mais aussi qu’il y a très peu de copier-coller dans les autres parties de la thèse.

1) Donc tout va bien, ce n'est que le chapitre central de la thèse (contenant un code qui justifiait l'embargo, empêchant donc la vérification par des tiers).

2) « très peu de copié-collé »… à quel moment c'est acceptable, « très peu de copié-collé ? »

La mansuétude des jurys me navre, vraiment. Une phrase copiée-collée devrait être suffisante pour disqualifier l'ensemble d'un travail. C'est malhonnête. Point final.

Et c'est lourdement systémique. Pour Derambarsh, de même, on a pu lire l'explication de la commission disciplinaire que 80% (je ne sais plus le chiffre) c'était quand même beaucoup. Alors que 0,1% de plagiat, c'est déjà la démonstration d'une incompétence (pas capable de le dire soi-même), et évidemment d'une malhonnêteté. J'entends les directeurs de thèse déplorer la propension au plagiat : refusez les travaux plagiés, même à toute petite dose. Nommez les plagieurs. Copier un paragraphe, c'est déjà malhonnête. En l'occurrence, on ne parle même pas de propos empruntés maladroitement reformulés où l'erreur d'appréciation d'un jury est possible, mais vraiment de crtl+c ctrl+v sans coquetterie.

De même pour Étienne Klein, qui utilise Bachelard pour meubler les pages de ses essais, et à qui l'on a retiré deux hochets inutiles, mais les livres sont toujours là, son rond de serviette à France Culture et les invitations diverses aussi.

Incompréhensible.